De la naissance à l’installation à Chambéry

      "Tout de bleu et de jonquille, tu es créé le 22 novembre 1853, à l’époque du Second Empire. Le duc d’Orléans, fils du roi Louis-Philippe, est à l’origine de ce projet ambitieux - la création des chasseurs - troupe d’élite par excellence, élite des troupes à pied et de l’infanterie légère.

DUC D'ORLEANS

Duc d'Orléans.

      Ces fameux chasseurs se sont déjà illustrés dès 1840 sur les champs de bataille d’Europe, au cours de la guerre de succession d’Autriche. Cette bravoure qui caractérise alors tes anciens, tu en fais toi aussi un des fondements de ta renommée, et c’est pour cela que, de tout temps, tu me fascines.

      A Besançon en 1854, tu ne profites guère de ton quartier : la guerre de Crimée d’abord, la campagne d’Algérie ensuite où tu débarques à la fin du mois de mai 1856 pour pacifier la Kabylie. Ton comportement y est toujours brillant mais tu perds, hélas, tes premiers chasseurs, tombés face à l’ennemi.

      En 1859, tu es envoyé sur la frontière de l’Algérie, à proximité du Maroc. A ton retour en Métropole, tu vogues de garnison en garnison, de Châlons à Strasbourg, en passant par Vincennes et Metz.

      Tu ne profites qu’une décennie de ce calme relatif puisque tu te retrouves naturellement engagé dans la guerre de 1870 contre la Prusse. Quels exploits accomplis alors ! A Froeschwiller, écrasés par le nombre, malgré des pertes terribles, tes chasseurs résistent de toute leur vaillance, pour l’honneur. Du siège de Strasbourg, à la bataille du Mans, tu continues la lutte, avec courage et volonté. Au sortir de cette guerre, vous-autres les chasseurs êtes outrés par la mise en cause de votre existence : vous passez en effet de 8 à 5 compagnies par bataillon.

COMBAT1870

Combats 1870.

      Ces épreuves de la guerre, ces incertitudes du lendemain, renforcent et cimentent votre cohésion, cette fameuse « culture chasseurs » dont la Protestation est une des expressions.

 

De l’installation à Chambéry à la fin de la Grande guerre

      Et toi, tu t’installes enfin à Chambéry en 1882, à la caserne Curial puis en 1889 au quartier Joppet. C’est tout naturellement que tu te tournes vers la montagne, que tu ne quittes plus désormais. L’instruction en montagne est de plus en plus présente. Tu deviens bataillon alpin de chasseurs à pied ; tu recrutes des guides, des porteurs et des chasseurs. Des forts sont construits en haute altitude et, au début du siècle, les skis sont utilisés pour la première fois.

Campagne de Madagascar

Campagne de Madagascar.

      Avant l’éclatement du premier conflit mondial, malgré ton attachement à la montagne, de nouveaux combats te portent à Madagascar : là, plus que l’ennemi, la maladie est dévastatrice.

      Et c’est la Grande guerre. Tu prends part désormais à l’épopée des Diables Bleus. Lorsque la guerre éclate, tu manœuvres dans la région de Lanslebourg. Dès le début des hostilités, tes 6 compagnies de 250 hommes rejoignent les Vosges, afin d’en garder la crête. Pour accomplir cette mission, 5 bataillons alpins sont regroupés. Les affrontements sont terribles et meurtriers. Au mois d’août 1914, l’attaque de Mandray te frappe cruellement : ton chef de corps, le commandant Verlet-Hanus, est blessé mortellement par un éclat d’obus.

      Les pertes humaines sont impressionnantes : Au 4 novembre 1914, tu as déjà perdu 323 chasseurs et 700 autres sont blessés. 80% des officiers sont morts au champ d’honneur.

Patrouille à ski

Combat à ski en 1914.

      Tes chasseurs ne cessent de repartir affronter l’ennemi, qui les redoute tout particulièrement. En effet, la détermination, le courage et l’abnégation ne sont-ils pas de ces vertus que l’on reconnaît le plus chez toi ? Ainsi, tu perds 586 hommes sur l’Hartmannwillerkopf ; et la bataille de l’Hilsenfirst, où la 2ème compagnie est décimée, mais héroïque, te vaut une citation à l’ordre de l’armée.

      En 1916, tu te rends en Alsace. Puis se succèdent les batailles de la Somme, de la Marne, de l’Aisne (au Chemin des dames), et de l’Italie, avant de revenir en France pour l’offensive finale.

      Pendant cette période, en 1552 jours de guerre, tu donnes 1473 des tiens à la France. Ton courage et tes actions d’éclat et d’héroïsme te valent d’obtenir 7 citations dont 4 à l’ordre de l’armée, et de recevoir la fourragère aux couleurs de la médaille militaire.

Affiche à la gloire des diables bleus

L’entre-deux guerres

      Après l’Armistice, tu participes à l’occupation de la Rhénanie, puis de la Haute Silésie jusqu’en Juillet 1922. De retour à Chambéry, tu demeures enfin dans la capitale de la Savoie que tu ne quittes que pour deux courtes absences, dans la Ruhr en 1923 et en Tunisie en 1924.

      Tu reprends assidûment ta formation en montagne, dans des conditions parfois des plus extrêmes. Tu connais, au cours de ces quinze années, des événements exceptionnels, heureux, mais parfois tragiques, et tu perds malheureusement certains de tes soldats dans la fréquentation de la montagne : le 28 février 1935, une tragédie bouleverse profondément tous les cadres et chasseurs. Non loin du refuge de la Madeleine, des officiers assistent, impuissants, à ce drame qu’est l’avalanche. 5 chasseurs périssent.

Ravitaillement en montagne

      Des événements plus heureux attendent cependant tes chasseurs : comment ne pas évoquer le défilé du 14 juillet 1938 sur les Champs Elysées, ou les Jeux Olympiques de 1936 ! Jeux dans lesquels, malgré une ambiance plus que pesante, ils se comportent d’une manière digne et patriote.

 

La deuxième guerre mondiale

      A l’image de la grande guerre, tu cantonnes à Lanslebourg lorsque la « drôle de guerre » éclate. Hormis la Section d’Eclaireurs Skieurs qui demeure en Maurienne, tu pars le 25 octobre 1939 pour une destination encore inconnue : le lendemain, tu arrives dans le Bas-Rhin. Relevé le 26 Janvier 1940, tu as passé 47 jours en ligne, exécutant de nombreuses patrouilles, tendant des embuscades, infligeant ainsi des pertes sensibles aux Allemands.

      Dans le secret total, tu es engagé dans une mission des plus périlleuses en Norvège, à Namsos, pour contrer l’Allemagne sur les ports de l’Atlantique. De multiples péripéties contrarient la mise en place de cette mission, un rembarquement improvisé doit être ordonné à la dernière minute. Malgré l’absence de succès, tu te bats en t’engageant totalement, sans matériel ni vivre.

      La Campagne de France est un désastre. C’est paradoxalement dans cet environnement que la confiance et le respect réciproque existant entre le chef de corps, les commandants de compagnie, les chefs et les chasseurs s’intensifient. Engagé dans une lutte déséquilibrée, ta résistance héroïque sur la Somme te vaut ta 5ème citation à l’ordre de l’armée.

      L’armistice te confine dans la région chambérienne et te laisse reprendre la formation en montagne. Beaucoup de tes cadres entrent dans la résistance, avec les chasseurs voulant échapper au Service du Travail Obligatoire. A partir de 1943, les premières actions importantes de rébellion sont menées à Chambéry.

Chasseur dans la resistance

Chasseur des bataillons de résistance.

      Reconstitué à partir des bataillons de la résistance « Savoie » et « Maurienne », au 1er janvier 1945 tu te prépares à l’offensive dont l’attaque du Roc Noir constitue un point culminant. Le combat est terrible, mais après cinq mois passés en haute montagne, tu marques de ta gloire ce lieu fortement symbolique de la renaissance du Bataillon. Tous tes chasseurs tombés au combat ont fait honneur à votre devise : « Sans peur et sans reproche ». Cette dernière action, longue de 16 jours de combat menés à plus de 2000 mètres d’altitude te vaut une 9ème citation.

 

L’époque moderne

      Les 7 années d’occupation en Autriche te permettent de renouer avec la montagne en temps de paix et t’offrent un terrain d’entraînement exaltant. Mais à ton retour à Chambéry en octobre 1952, tu abandonnes ton statut de bataillon de combat pour te transformer en centre d’instruction. Tu participes cependant partiellement à la campagne d’Indochine et à celle de Corée, en y envoyant quelques détachements. Pendant la guerre d’Algérie, tu restes bataillon d’instruction, à Chambéry.

      En 1963 le fusionnement du 15ème Bataillon de chasseurs alpins (alors à Modane) et du centre d’instruction de Chambéry te permet de retourner aux sources de l’alpinisation et de consacrer toute ton énergie à retrouver ton aptitude au combat en montagne. Tu es alors réparti sur 2 quartiers au centre de Chambéry. Les impératifs d’une unité de combat moderne imposent le regroupement de tes unités dans un ensemble plus fonctionnel. De fait, tu quittes les vieux quartiers pour t’installer en périphérie, au quartier Roc Noir de Barby, inauguré le 2 octobre 1981 par le ministre de la défense, Charles Hernu.

inauguration du quartier 1981

Inauguration du Quartier Roc Noir par Charles Hernu.

      Intégré à la 27ème Division alpine en 1976, tu te transformes d’une manière presque prémonitoire, puisque, dans le cadre de la Force d’action rapide, tu commences en 1984 une première professionnalisation, qui est malheureusement interrompue à la veille de la guerre du Golfe.

      Depuis ta re-création au lendemain de la guerre d’Algérie, avec tes appelés comme avec tes professionnels, tu te spécialises dans le combat en montagne et tu acquiers une véritable compétence dans tous les domaines de la vie en altitude. De nouvelles missions t’envoient outre mer, en Guyane, en Martinique ou en Nouvelle Calédonie, mais aussi au Liban, en ex-Yougoslavie, ou en Afrique.

 

Le 13 aujourd’hui

      Tu possèdes l’âme, l’état d’esprit et l’histoire qui font les bataillons à forte personnalité.

      Aujourd’hui, tes matériels ont certes évolué : les armements modernes t’obligent à davantage de technicité ; les véhicules blindés ont remplacé les simples camions de transport. Mais la qualité des hommes reste la même et tes cadres et tes chasseurs sont toujours prêts à servir, sur tous les fronts, toujours fidèle à ta réputation et à ta devise.

La garde au fanion

Portes-fanion sur la place d'armes.

      13° Bataillon de chasseurs alpins, tu peux être fier de tes racines, de tes actions passées ou actuelles. Tu peux être fier de ce beau pays qui t’a accueilli voici plus de cent ans, de ces montagnes que tu aimes tant fréquenter, et de tous ces gens qui t’entourent et dont les familles ont tant donné pour que les Français vivent libres.

      Qui, mieux que tes chasseurs, connaît le prix de cette terre ? Reste sur la trace faite par tes anciens, fidèle à tes vallées, fidèle à ton pays, et sois toujours à la hauteur de ta renommée et de tes ambitions!"